Selon une étude de la Commission européenne, on compte « 28 millions de travailleurs des plateformes dans toute l’Union Européenne ». Selon cette même étude, ce chiffre devrait atteindre 43 millions d'ici 2025. La majorité d’entre eux travaillent dans le secteur de la livraison.
Ces chiffres impressionnants ont rapidement suscité l'intérêt des politiques, au point que le statut des travailleurs de ces plateformes est désormais une préoccupation au niveau national et européen. En 2021, une directive de l’Union Européenne a donné le mot d’ordre. Dans certains cas, ces travailleurs ne sont pas considérés comme des indépendants, mais comme des salariés à part entière – avec tous les droits et les avantages qui en découlent. Quelles sont les principales évolutions sur le statut des travailleurs des plateformes ? Nous en parlons dans cet article.
Avant d’en venir à la question du statut, il importe de définir qui sont les principaux concernés. D’après le code de la consommation français (article L.111-7 et suivants), une plateforme est un professionnel qui fait :
Pour faire moins technique, une plateforme est donc une entité numérique par laquelle transite des informations, des biens ou des services. Cette entité est le lieu de la rencontre de l’offre et de la demande. Nous parlons ainsi de plateforme de livraison, comme Deliveroo, de plateforme de covoiturage, de plateforme freelance comme Creads ou de micro-travail comme l’ancien 5euros.com.
Les travailleurs de ces plateformes sont ceux qui fournissent le bien ou le service, pour son compte ou pour le compte de la plateforme. C’est le livreur de Deliveroo, les rédacteurs de creads et les prestataires de 5euros.com.
Le cœur du problème réside dans la question de protection du travailleur. En effet, le travailleur de plateforme n’est pas un salarié CDI. Il ne bénéficie donc ni de protection sociale, ni de droit syndical. Aucun texte ne détermine ses droits au congé, ni les règles de la durée maximale du travail. En même temps, peu ont un réel statut de micro-entrepreneur. Ce vide juridique laisse une liberté trop grande aux plateformes et laisse les travailleurs dans une certaine précarité, alors que l’exécution du travail réunit certaines conditions du salariat.
Plusieurs propositions ont été déposées au niveau de la Commission Européenne ou expérimentées dans divers États du Monde. Elles montrent des possibilités d’évolution du statut des travailleurs des plateformes.
Comme nous l’avons expliqué plus haut, la France a adopté la position de la consécration des droits, et non du statut. Tous les droits et obligations précités trouvent ainsi application. Cependant, il faut noter qu’elles ne concernent – pour l’heure, que les plateformes de transport et de livraison. Les autres types de plateformes ne sont pas encore couvertes, car la situation de précarité de leurs travailleurs n’est pas encore établie.
A côté des textes européens, la Directive de la Commission Européenne du 9 décembre 2021 est celle qui donne le ton du futur du statut des travailleurs des plateformes. La Directive couvre d’ailleurs toutes les plateformes de travail numériques qui « fournissent un service répondant à la demande du consommateur final, par des moyens électroniques et au moyen de travail exécuté par des individus ». Comme le RGPD (règlement Général sur la Protection des Données), la Directive ne distingue pas selon la localisation de la plateforme et ne tient compte que du fait, qu’au final, le travail exécuté par lesdits individus soit fait dans l’Union Européenne. Par contre, les plateformes qui ne font que relayer l’information (vente d’espace et d’affichage d’une offre) ou qui relient un consommateur avec un autre consommateur (location de vacances ou covoiturage), ne seront pas concernées. Cette Directive est aujourd’hui, une proposition de loi à soumettre au Parlement européen.
Deuxièmement, la Directive met en place des règles pour accroître la transparence des algorithmes des plateformes, en mettant en place un ensemble de droits et d’obligations.
Enfin, la Directive insiste sur l’importance des négociations collectives. Elle insiste sur l’obligation d’information et de consultation des travailleurs par rapport aux « décisions de gestion algorithmique ». En outre, elle incite les plateformes à favoriser des processus d’élection de représentants des travailleurs et à mettre en place des moyens de communication entre les travailleurs et leurs représentants.