L’actualité a braqué ses projecteurs sur le statut « d’auto entrepreneur » nouvellement dénommé « micro entrepreneur » depuis le 1er janvier 2016. Le collaborateur engagé sous ce statut est un indépendant, ce qui exclut tout lien de subordination. Impossible donc pour l’entreprise d’exiger l’exclusivité de collaboration et il est complexe de fixer des obligations quant aux conditions d’exercice de la prestation que le collaborateur réalise pour l’entreprise (tenue exigée ou uniforme, horaires imposés,…). Sujet récurrent de l’actualité, la plateforme digitale de chauffeurs VTC Uber a particulièrement éprouvé ce cadre avec des « fortunes diverses ».
Ce statut de travailleur indépendant présente aussi des aléas bien réels pour l’entreprise. Le plus grand danger pour ces plateformes digitales de mise en relation étant est le risque de requalification en CDI (une jurisprudence « Le Cab » de décembre 2016 a déjà démontré qu’une exclusivité d’activité avait valu à un chauffeur indépendant une décision de requalification en emploi, sans passer par la case recrutement).
La responsabilité des plateformes digitales
Autre problématique vécue par la plateforme digitale Deliveroo avec ses livreurs. L’entreprise a rapidement été confrontée à la question de la responsabilité accident et dommage. Depuis lors la Loi travail de 2016 a prévu qu’à compter du 1er janvier 2018, il soit fait obligation aux entreprises qui utiliseraient ce mode de collaboration, de prendre en charge l’assurance couvrant les risques « d’accident du travail ». Les plateformes digitales d’emploi seront alors été amenées à prendre en charge les cotisations « Responsabilité Civile professionnelle ». Le Groupe La Poste a pris en charge ces cotisations pour sa plateforme digitale de service de livraison Stuart.
L’évolution réglementaire est à l’extension des droits des travailleurs indépendants (et au rapprochement des statuts). L’obligation faite aux « entreprises employeurs » de travailleurs indépendants de prendre en charge les cotisations afférentes aux maladies professionnelles, ainsi que la contribution à la formation professionnelle, en témoigne.
La question de la couverture santé reste, à cette étape, « pendante ». En effet le travailleur indépendant ne relève pas du régime général de la Sécurité Sociale mais du Régime Social des Indépendants (RSI). Ce dernier, très décrié, va disparaître. Cette suppression sera étalée sur 2 années. L’adossement de la seule gestion des dossiers du RSI auprès du régime général ne signifie pas uniformisation des statuts entre salariés et personnes travaillant pour leur compte. Néanmoins l’évolution des différents régimes assurantiels est celle d’une logique d’harmonisation des droits avec l’époque. Cette harmonisation est assumée et revendiquée par le gouvernement qui en a fait un objectif en ce qui concerne l’ouverture des droits à indemnisation des travailleurs indépendants.
C’est à l’aune de cette perspective d’harmonisation que la reconstruction d’un régime des indépendants sera repensée.
Les plateformes digitales mises à contribution
La couverture santé, telle que gérée par la Sécurité Sociale et le RSI, et les droits qui la composent sont déjà globalement proches. Ils sont similaires tant pour la maladie et les remboursements médicaux, qu’en ce qui concerne les médicaments et la prise en charge des frais d’hospitalisation. Ce qui diffère réellement c’est le financement des cotisations. Partagé entre salariés et entreprises d’un côté et à la seule charge du travailleur indépendant de l’autre côté.
Mais comme on l’a vu ci-dessus certaines cotisations, au bénéfice des travailleurs indépendants, doivent dès aujourd’hui être à prises en charge par l’entreprise qui a cosigné le contrat de prestation de service avec le travailleur indépendant.
La tendance à la convergence et à l’harmonisation des droits et protections devrait aboutir à la mise en place d’un corpus de Droits Sociaux identiques, ou très proches, gérés par la Sécurité Sociale pour les salariés et un RSI transformé et rénové dont le financement sera également co-assuré par les entreprises employeurs d’indépendants et les plateformes digitales ou marketplaces.
Ce qui continuera de différencier les deux statuts sera relatif aux conditions de cessation ou de rupture de la collaboration. Encadrées par les règles du Code du travail pour les salariés et régies par les seules règles commerciales pour les travailleurs indépendants.
De ce rapide panorama il ressort que la question du mode contractuel d’engagement d’un collaborateur ne doit pas être déterminée par une simple analyse de coûts mais par celle d’une analyse des besoins réels de l’entreprise. Besoin ponctuel ou besoin de long terme. Intégration de compétences et de savoirs au service du développement de l’entreprise et de son avenir, par le biais de recrutements, ou besoin de réalisation permanente de tâches simples et répétitives…
Cela modifie les profils recherchés et le mode de collaboration qui pourra être choisi.